L’hôpital, objet de convoitises des labos

L’hôpital, objet de convoitises des labos

Les laboratoires pharmaceutiques travaillent dans l’ombre afin d’influencer médecins et décideurs publics. Alternatives Economiques publie des données exclusives qui prouvent leur omniprésence dans la politique économique du médicament. Deuxième volet de l’enquête du magazine Alternatives Économiques en quatre épisodes.

Carton rouge. C’est avec cette sanction symbolique – à valeur d’exemple – que l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), premier centre hospitalier de France, met en garde les médecins qui se retrouvent dans des situations de liens d’intérêts* qu’elle juge « excessifs », car trop visibles, avec les laboratoires pharmaceutiques. Martin Hirsch, le directeur général, en dispense en moyenne six par an. Même si l’AP-HP est pionnière en France en la matière, cela reste peu au regard de la fréquence de ces liens. Selon notre enquête, pas moins de 73 % des médecins de l’AP-HP entretiennent des liens d’intérêts avec des laboratoires.

77,5 % des médecins hospitaliers sont en lien avec les labos dans l’ensemble des centres hospitaliers universitaires (CHU)

Ils sont plus nombreux encore à l’échelle de l’Hexagone : en moyenne, 77,5 % des médecins hospitaliers sont en lien avec les labos dans l’ensemble des centres hospitaliers universitaires (CHU) ! Ces données exclusives, extraites par Alternatives Economiques avec l’aide des associations Regards citoyens et Formindep1 , reflètent la forte pénétration des délégués commerciaux des laboratoires au sein des hôpitaux. Elles pointent aussi un système encore très opaque de circulation des financements pour la recherche. Il faut dire que pour les labos, l’hôpital est une cible stratégique sur le marché français.

Un marché moteur

En France, les médicaments sont écoulés soit via les pharmacies, où les patients se rendent après la consultation (ou pas) d’un médecin, soit via les hôpitaux. Le marché hospitalier représentait 7,4 milliards d’euros en 2016, sur un chiffre d’affaires total du médicament en France de 27,6 milliards d’euros, soit un peu plus d’un quart, selon un rapport de Xerfi2. Mais surtout, « les laboratoires sont prêts à tous les « sacrifices » pour que les médicaments soient prescrits en première intention à l’hôpital, car ils savent que le renouvellement est ensuite quasi automatique par les médecins de ville », explique Etienne Caniard, ancien membre de la Haute autorité de santé, dans un récent ouvrage3. De fait, jusqu’à la moitié des prescriptions des généralistes en médecine de ville sont prédéterminées par celles des médecins hospitaliers4.

Ces derniers sont par conséquent au centre des attentions des laboratoires. Parmi les « avantages » les plus courants qui leur sont octroyés, il y a l’invitation à des colloques, dont le coût moyen s’élève à 1 211 euros, selon l’AP-HP. Faute de budget public, la formation médicale des praticiens continue en effet à être financée à hauteur de 98 % par l’industrie pharmaceutique, selon l’Igas5. « Si la qualité scientifique de ces colloques n’est pas forcément remise en cause, c’est surtout l’occasion pour les labos de promouvoir leur nouveau médicament dans une logique marketing, en insistant peu sur les contre-indications et les effets secondaires », affirme Paul Scheffer, du Formindep.

Des « associations de service » opaques

Mais le principal intérêt des laboratoires pharmaceutiques est ailleurs. « La participation des médecins hospitaliers à la recherche clinique et leur influence nous importent davantage que leurs prescriptions », affirme un dirigeant d’une grande entreprise pharmaceutique. Pour obtenir l’autorisation de mise sur le marché (AMM) d’un médicament, un laboratoire doit en effet effectuer des essais cliniques, qui sont encadrés par des normes internationales et doivent obligatoirement avoir lieu en CHU. D’où la nécessité pour les industriels de trouver des équipes médicales au sein de ces établissements. (…)

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Lire aussi (volet 1 de l’enquête d’Alternatives Economiques) : https://www.alternatives-economiques.fr//lobbying-labos-pharmaceutiques-ne-lachent-rien/00082521

La grande misère des hôpitaux psychiatriques

La grande misère des hôpitaux psychiatriques

10 à 20 % des Français sont concernés, mais la psychiatrie publique est le parent pauvre de la médecine. À Rennes, les soignants sont en grève.

« Le patient est devenu un objet. Je dis aux jeunes de fuir », se désole Michel Roy, infirmier à l’hôpital psychiatrique de Rennes, en grève depuis deux mois. La psychiatrie publique, parent pauvre de la médecine, traverse un malaise profond : soignants, patients et familles réclament un plan ambitieux. À l’entrée principale de l’établissement Guillaume-Régnier, dans la capitale bretonne, le ton est donné : « hôpital sans lits », « redonnons du sens à notre travail », « souffrance au travail » figurent parmi les nombreuses banderoles accrochées aux grilles.

Les pathologies relevant de la psychiatrie sont en France au troisième rang des maladies les plus fréquentes, après le cancer et les maladies cardiovasculaires. Entre un dixième et un cinquième de la population risque d’être atteint par un trouble mental à un moment quelconque de la vie, selon le rapport de la Cour des comptes de 2011. Pour la ministre de Santé Agnès Buzyn, « la santé mentale est un enjeu important des besoins de santé des Français ». « Cette discipline a été un peu trop délaissée ou mise à l’écart ces dernières années », a-t-elle affirmé jeudi à l’AFP. Malgré un constat unanime, les acteurs du secteur se sentent abandonnés par l’État.

« On n’en peut plus », déplore Jean-Pierre Salvarelli, membre du bureau national du Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH) et chef de pôle au CH du Vinatier, près de Lyon. Il est l’un des signataires de l’appel des psychiatres et médecins pour dénoncer une dégradation de la prise en charge des patients et la « tyrannie des économies comptables », en février 2017.

Soit on supprime des postes, soit on supprime des lits.

Des praticiens du CH de Montfavet, près d’Avignon, se sont associés en avril à leurs collègues lyonnais et plusieurs mouvements de grève ont émergé ces derniers mois, notamment à Rennes, Allonnes (Sarthe), Amiens (Somme), Bourges (Cher) et Cadillac (Gironde). « On est sans cesse en train de se restructurer. Aujourd’hui, notre idée est d’entrer en résistance et d’interpeller les pouvoirs publics. Les impacts budgétaires, c’est soit on supprime des postes, soit on supprime des lits », expose le Dr Salvarelli, psychiatre depuis vingt-cinq ans au Vinatier, structure de 750 lits, 2 500 membres du personnel hospitalier et 22 500 patients suivis chaque année.

C’est l’un des trois plus gros hôpitaux de France en psychiatrie avec Sainte-Anne à Paris et Guillaume-Régnier à Rennes. Dans cet établissement breton, « le ras-le-bol et la tentative de suicide d’une collègue » ont décidé les syndicats à lancer un mouvement de grève, explique Goulven Boulliou, de Sud Santé Sociaux.

Il n’est pas rare de retrouver un collègue seul à 23 heures pour gérer 15 personnes.

Depuis le 7 novembre, les soignants se relaient 24 heures sur 24 pour assurer le piquet de grève. « On pose des heures, des jours », détaille l’infirmier. Devant le bâtiment rennais datant du XVIIe siècle, grévistes, patients et familles se retrouvent sous un barnum autour d’un brasero et d’un thermos de café. « Avec cette tente, on a recréé un lien social. C’est un espace de parole qui, dans les murs de l’hôpital, n’existe pas », explique Myriam, aide-soignante. « Le mardi, on propose galette-saucisse », sourit cette mère de trois enfants. Cette journée est surtout celle de l’assemblée générale où est décidée la poursuite du mouvement, reconduit sans discontinuer à l’exception de la trêve de Noël.

Au fil des années, un mal-être s’est installé à Guillaume-Régnier. En 2016, l’absentéisme était de 8,5 %, une progression de 1,5 point en deux ans, selon Sud Santé et la CGT. Près de 1 400 signalements liés à des dysfonctionnements (violence, manque de lits, sous-effectifs) ont été adressés à la direction, à l’inspection du travail et au préfet. « Il n’est pas rare de retrouver un collègue seul à 23 heures pour gérer 15 personnes », dénonce Goulven Boulliou, de Sud Santé. « Les collègues ont des idées noires. On a peur que cela se termine en suicide », craint Martine, 58 ans, qui s’occupe des soins paramédicaux.

Pour Sud Santé, la dégradation des conditions d’accueil, comme » l’admission sur des fauteuils dans l’attente de la libération d’un lit » ou » des chambres dont la température est tellement froide que même quatre couvertures ne suffisent pas à se réchauffer », génère des comportements violents chez certains patients et, par effet domino, conduit à des comportements maltraitants. (…)

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Comment la pollution affaiblit nos défenses 

Comment la pollution affaiblit nos défenses 

En pic ou ambiante, la pollution est dangereuse pour notre santé respiratoire. Elle est à l’origine de nombreux dérèglements comme des crises d’asthme ou la survenue d’allergies.

Quinze mètres cubes: c’est le volume d’air qu’un adulte inspire en moyenne tous les jours. Et avec l’air, l’ensemble des polluants chimiques émis par l’activité humaine des grandes villes, des zones industrielles et des zones agricoles.

Si des travaux expérimentaux ont pu montrer chez l’animal que l’exposition à certains de ces polluants induisait des perturbations du système immunitaire, l’évaluation scientifique de leurs effets sur la santé humaine reste délicate: leurs concentrations atmosphériques varient selon les saisons et les circonstances climatiques, tout comme les durées auxquelles nous pouvons y être exposées.

Pics polluants

Au printemps, les particules fines (PM10 et PM2,5), couplées avec les pollens, augmenteraient plutôt le risque de manifestations allergiques ou cardiovasculaires et en été, pour peu qu’il soit ensoleillé, l’ozone, ce gaz très irritant, celui d’inflammation des voies respiratoires. Mais, en dehors des fameux «pics» de pollution, dont on cherche à éloigner les individus les plus fragiles (enfants, femmes enceintes, personnes âgées et malades chroniques), la pollution de fond, tout au long de l’année, insidieuse, n’épargne personne.

Lors des pics de pollution, on constate un plus grand nombre d’hospitalisations pour crise d’asthme, infarctus ou AVC. «Mais il s’agit plutôt d’une exacerbation de maladies chroniques respiratoires ou cardiovasculaires déjà présentes», précise le Pr Jocelyne Just, chef de service d’allergologie pédiatrique à l’hôpital Trousseau, à Paris, et présidente de la Société française d’allergologie. Cela dit, plus les femmes enceintes y sont exposées, plus elles ont de risques de mettre au monde un bébé qui développera de l’asthme et/ou des allergies au cours de l’enfance.

Malade à cause de la pollution

«La pollution de fond, elle, entraîne chez les enfants, et c’est prouvé, un ralentissement de la croissance pulmonaire, susceptible de créer de l’asthme ou des allergies», explique la spécialiste. Des études de cohorte, où l’on a pratiqué des explorations fonctionnelles respiratoires, ont montré une moins bonne compétence respiratoire chez les enfants exposés.

La pollution peut aussi, lorsqu’on y est exposé longtemps, devenir pathogène. «En irritant les voies aériennes, elle entraîne une inflammation chronique qui peut vous rendre allergique à ce que vous supportiez jusqu’à présent (les pollens par exemple) et pourrait suffire à vous provoquer une crise d’asthme ou à exacerber vos allergies…», précise le Pr Just. (…)

 

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Mourir de chaud, un risque pour 30 % de la population mondiale

Mourir de chaud, un risque pour 30 % de la population mondiale

Sans une réduction drastique des gaz à effet de serre, les trois quarts des habitants de la planète seraient exposés à des vagues de chaleur potentiellement mortelles à la fin du siècle.

 

Alors qu’une partie de la France est placée en vigilance orange pour la canicule, une étude se penche sur le risque de « mourir de chaud », au sens propre. Publiée en ligne lundi 19 juin dans la revue Nature Climate Change, elle conclut que ce danger guette aujourd’hui près d’un individu sur trois dans le monde. Une proportion qui pourrait grimper à trois sur quatre à la fin du siècle, si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent à leur rythme actuel.

Pour poser ce diagnostic, une équipe américano-britannique de dix-huit chercheurs, dont la plupart travaillent à l’université de Hawaï, a compilé la littérature scientifique documentant les cas de mortalité supplémentaire associée à des vagues de chaleur, entre 1980 et 2014. Elle en a identifié 783, observés dans 164 villes de 36 pays. Parmi eux figurent la canicule de l’été 2003, à l’origine de 70 000 morts excédentaires en Europe, dont environ 20 000 en France, et près de 5 000 à Paris, celle de 2010, à laquelle sont imputés 55 000 décès supplémentaires en Russie, dont près de 11 000 à Moscou, ou celle qui avait frappé Chicago en juillet 1995, responsable de plus de 700 morts.

Les auteurs ont ensuite croisé ces données avec les paramètres climatiques enregistrés lors de ces épisodes : température de l’air, taux d’humidité relative, ensoleillement, vitesse du vent… Ils en ont déduit que le facteur déterminant, pouvant altérer la capacité de thermorégulation de l’organisme humain et provoquer un état d’hyperthermie, était le couple température-humidité, cette dernière renforçant la chaleur ressentie. Ils ont alors calculé un seuil à partir duquel l’association de ces conditions ambiantes peut devenir fatale.

Les chercheurs n’affirment évidemment pas que le dépassement de ce seuil conduit à un trépas inéluctable, mais simplement qu’il expose à un « coup de chaud » potentiellement mortel. Différentes parades peuvent en effet être mises en œuvre pour éviter une telle extrémité, allant de l’équipement individuel en système de climatisation jusqu’à la politique publique de prévention.

Les tropiques en surchauffe

A l’aune de ce critère, l’équipe a établi qu’en 2000, le seuil fatidique de température et d’humidité a été franchi, pendant au moins vingt jours, sur environ 13 % de la surface continentale de la planète, abritant 30 % de la population mondiale.

Lire aussi :   Tous les indicateurs du réchauffement climatique sont au rouge

Qu’en sera-t-il demain ? La menace ne va faire que s’amplifier, répondent les auteurs. Son niveau dépendra toutefois de celui des émissions futures de gaz à effet de serre. Dans le scénario le plus optimiste du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui suppose une réduction rapide et drastique de ces émissions et limite ainsi à 1 °C le réchauffement en 2100, la zone de danger concernerait 27 % de la surface du globe et 48 % de la population à la fin de ce siècle. Dans le scénario le plus pessimiste, avec lequel les rejets carbonés conservent une courbe ascendante entraînant un réchauffement moyen de 3,7 °C en 2100, ce sont 47 % du territoire et 74 % des individus qui seraient mis en péril.

Nombre de jours dépassant le seuil de conditions climatiques potentiellement mortelles en 2100, dans un scénario avec une forte réduction des émissions de gaz à effet de serre (à gauche) et dans un scénario où les émissions se poursuivent au rythme actuel (à droite).

Face au risque de surchauffe, tous ne sont cependant pas égaux. Bien que les modèles des climatologues prévoient des hausses de température plus marquées aux latitudes élevées, les régions tropicales seront « exposées de façon disproportionnée à davantage de jours avec des conditions climatiques potentiellement mortelles », prédisent les chercheurs.

La raison en est l’humidité importante qui y prévaut toute l’année, ce qui fera dépasser la cote d’alerte même avec une moindre montée du thermomètre. Partout, en revanche, la menace sera aggravée par le vieillissement de la population et sa concentration croissante dans les zones urbaines, sujettes au phénomène des îlots de chaleur.

Lire aussi :   La température des villes les plus peuplées pourrait croître de 8 °C d’ici à 2100

« Prix ultime »

« Le grand intérêt de cette publication est sa dimension globale, estime Robert Vautard, directeur de recherche au CNRS (Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, Institut Pierre-Simon-Laplace), qui n’a pas participé à ce travail. On sait que les vagues de chaleur tuent, mais c’est la première fois qu’une étude dépasse les analyses locales, en s’appuyant sur une bibliographie très large et une méthode statistique à la fois précise et innovante. »

Sans doute ces résultats reposent-ils sur des modélisations. Les auteurs en pointent eux-mêmes certaines limites : les données ont été collectées sur une période relativement courte (trois décennies) et ne sont peut-être pas exhaustives, les incertitudes sont plus grandes pour les hautes latitudes et, surtout, de multiples facteurs (démographique, socioéconomique, urbanistique…) peuvent influencer la vulnérabilité future des populations.

C’est précisément sur l’importance des politiques d’atténuation du changement climatique et d’adaptation à ses conséquences que les chercheurs mettent l’accent. (..)

 

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L’obésité, maladie de « pauvres »

L’obésité, maladie de « pauvres »

L’épidémie d’obésité se propage dans le monde, entraînant une augmentation des maladies chroniques associées : diabète, maladies cardio-vasculaires, certains cancers… C’est même l’une des premières causes avancées du fléchissement de l’espérance de vie aux Etats-Unis. En France, le surpoids et l’obésité sont restés stables entre 2006 et 2015, selon le volet nutrition de l’Etude de santé sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition (étude Esteban), rendu public mardi 13 juin. Si cette stabilisation est une bonne nouvelle, l’obésité et le surpoids restent à des niveaux élevés.

Surpoids pour un adulte sur deux

Un adulte sur deux (54 % des hommes et 44 % des femmes) était en surpoids en 2015, et un sur six obèse. Le surpoids touche 17 % des enfants de 6 à 17 ans et l’obésité 4 % (1 % de plus qu’en 2006). La mise en place du Programme national nutrition santé (PNNS) en 2001 par le ministère de la santé semble avoir des effets. Sa quatrième version est en cours. Cette stabilité ne doit toutefois pas masquer de fortes inégalités sociales en termes de corpulence, une réalité qui frappe tous les pays développés.

« Si la prévalence du surpoids chez l’enfant reste globalement stable en France depuis les années 2000 et relativement faible par rapport à ses voisins européens, je m’interroge ­depuis longtemps sur les raisons pour lesquelles les inégalités sociales sont si marquées », questionne ainsi Sandrine Lioret, chercheuse en épidémiologie à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

Lire aussi le témoignage :   Il est urgent de lutter contre la « grossophobie »

Il fut un temps, lors des disettes médiévales, où les « clercs bien gros et gras » étaient valorisés, comme le décrit l’historien Georges Vigarello (Ecole des hautes études en sciences sociales, CNRS), dans Les Métamorphoses du gras. Histoire de l’obésité (Seuil, 2010). Le « gras » était alors ­synonyme d’opulence, bien loin de la dictature actuelle de la minceur. Aujourd’hui encore, être trop gros peut être un marqueur social, mais qui pointe à l’inverse plus souvent les populations défavorisées.

De fait, l’étude Esteban montre que les personnes les moins diplômées sont plus fréquemment obèses. Ainsi 60,8 % des hommes dont le niveau d’études est inférieur au baccalauréat sont en surpoids, contre 42 % de ceux de niveau bac + 3. Même tendance chez les femmes, avec 53,4 % de celles n’ayant pas le bac en surpoids contre 29,6 % des femmes de niveau bac + 3. De même, chez les enfants, ceux dont le père ou la mère n’avaient pas de diplôme ou un diplôme inférieur au baccalauréat étaient plus souvent en surpoids ou obèses.

Photo extraite de la série d’autoportraits « Eleven Years ». Ce travail a été mené durant onze années par la photographe Jen Davis.

Fortes disparités régionales

Ces résultats confirment les tendances observées par la cohorte épidémiologique Constances en 2016, avec de fortes disparités régionales : 25,6 % dans le département du Nord, 10,7 % à ­Paris, zone la moins touchée. Là encore, il est montré que le taux d’obésité est inversement proportionnel au niveau socio-économique.

Un chiffre : un peu plus de 30 % des femmes dont le revenu mensuel est inférieur à 450 euros sont obèses, ce taux chutant à 7 % chez celles qui disposent de plus de 4 200 euros par mois. « Il y a une trajectoire biologique, psychologique et sociale de l’obésité qui s’impose à la personne concernée », résume le professeur Olivier Ziegler, coordinateur du Centre spécialisé de l’obésité de Nancy. (…)

 

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Pourquoi votre cerveau émotionnel peut vous faire voter pour le mauvais candidat

Pourquoi votre cerveau émotionnel peut vous faire voter pour le mauvais candidat

À trois jours du scrutin présidentiel, savez-vous quel candidat aura votre suffrage ? Votre cerveau est loin d’être inactif pendant cette campagne. On vous explique ici les mécanismes cérébraux de la prise de décision. Spoiler : une « banane » intervient dans l’histoire, et menace votre rationalité.

La pensée humaine. Cerveau d'un homme avec les zones relatives au sens, à l'imagination, à l'intellect..., gravure sur cuir, milieu du 17e siècle
La pensée humaine. Cerveau d’un homme avec les zones relatives au sens, à l’imagination, à l’intellect…, gravure sur cuir, milieu du 17e siècle Crédits : Sudhoff-Institut, Leipzig, Allemagne /photo VCG WilsonGetty

Voter​ ​ou​ ​ne​ ​pas​ ​voter à ce scrutin présidentiel du 23 avril ? Voter « utile », ou selon ses idéaux ?​ ​Pour​ ​lequel des onze candidats​ ​? La prise de décision est une fonction​ ​essentielle​ ​du​ ​cerveau. Le 25 avril 2014, l’émission Science publique de Michel Alberganti la passait au scanner des neurosciences. Avec notamment Philippe​ ​Damier, professeur​ ​de​ ​neurologie​ ​au​ ​CHU​ ​de​ ​Nantes et Alain​ ​Berthoz,​ ​neurophysiologiste. Grâce à cette archive (toujours d’actualité malgré les progrès des neurosciences, nous a assuré Philippe Damier), on lève le voile sur les mécanismes à l’œuvre dans votre petite usine mentale lorsque vous devez peser le pour, le contre, convoquer votre libre arbitre, et finalement, opter pour le choix qui vous semble juste. Sachant qu’une donnée vient compliquer l’équation : les émotions, parties prenantes du processus, qui peuvent menacer la rationalité de votre choix.

[SUuvre le lien vers l’article d’origine pour accéder au podcast]

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L’excès de sport nuit à la libido des hommes 

L’excès de sport nuit à la libido des hommes 

Vous enfilez vos chaussures de course tous les matins pour parcourir 10 kilomètres? Vous avalez 200 kilomètres par semaine sur votre vélo? Ne vous étonnez pas si votre appétit sexuel vous semble quelque peu en sommeil… Les sports d’endurance comme la course à pied ou le vélo, pratiqués de manière intensive, auraient, en effet, un effet négatif sur la libido, révèle une étude publiée sur le site de la revue Medicine & Science in Sports and Exercise.

Les chercheurs de l’université de Caroline du Nord, aux États-Unis, ont soumis plus de 1000 hommes à un questionnaire sur leurs habitudes sexuelles et sportives, notamment sur la durée et l’intensité de leurs entraînements. La plupart des participants pratiquaient la course à pied ou le vélo. Les résultats montrent que ceux qui s’entraînaient le plus longuement et le plus intensément avaient une libido réduite. À l’inverse, les hommes qui avaient une activité physique légère ou modérée avaient des niveaux de libido plus élevés.

Le corps fait des choix en permanence

Les chercheurs n’expliquent pas la nature du lien qu’ils viennent d’établir. Ils suggèrent un impact de l’activité physique sur le taux de testostérone, et donc sur la libido ou sur la fertilité. «Les spécialistes de la fertilité interrogent souvent les femmes sur leur pratique sportive. Selon nos données, nous pensons qu’ils devraient aussi interroger les hommes», conclut le Pr Anthony Ackney, l’un des auteurs de l’étude.

Les résultats de cette étude n’étonnent pas vraiment le Pr Jean-François Toussaint, directeur de l’Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport (Irmes, à l’Insep), qui explique que le corps fait des choix en permanence. «Lorsqu’on réalise des efforts intenses et soutenus, l’organisme et ses cellules réorientent préférentiellement les voies de production énergétique vers l’option choisie, l’exercice, et moins vers les autres.

Preuve de ce phénomène, le dérèglement des cycles menstruels chez les femmes très sportives: chez les meilleures marathoniennes mondiales, l’aménorrhée (absence de règles) est fréquente. Mais ce phénomène est transitoire, réversible et sans conséquence sur le long terme ni sur les maternités. «Selon les études menées à l’Irmes, lorsqu’elles décident d’arrêter l’entraînement pour concevoir un enfant, elles sont enceintes dans les quelques mois qui suivent ; preuve que le corps est tout aussi “performant” dans ce domaine», rassure le professeur Jean-François Toussaint, qui ajoute: «Ces mécanismes, associés à la longévité plus grande des athlètes de haut niveau, commencent à nous faire mieux comprendre les relations intimes entre performance et survie.»

Ce qui vaut pour les sportifs de haut niveau s’applique-t-il à des sportifs amateurs? Sans doute, mais dans une moindre mesure. «Lorsque les gens rentrent du boulot fatigués, leur libido n’est pas forcément au top. C’est un peu la même chose avec les personnes surentraînées, elles sont fatiguées, manquent de tonus physique et psychique, et leur libido en pâtit», explique le Dr Antoine Faix, urologue et sexologue, responsable du comité d’andrologie et de médecine sexuelle de l’association française d’urologie. (…)

 

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Anorexie, boulimie : le poids des rapports sociaux

Anorexie, boulimie : le poids des rapports sociaux

Carte blanche. Et si le comportement des jeunes femmes de familles aisées, les plus concernées, provenait de tensions entre générations, entre classes ?

Elles sont jeunes, leurs parents sont souvent cadres ou professions intermédiaires… ce qui les prédispose à être en bonne santé. Et pourtant elles ont des comportements anorexiques ou boulimiques. Les caractéristiques qui devraient les protéger sont-elles au principe de leur ­pathologie ?

C’est ce mystère de santé publique que cherchent à résoudre Claire Scodellaro (Paris-I), Jean-Louis Pan Ké Shon (Institut national de la statistique et des études économiques) et Stéphane Legleye (Institut national de la santé et de la recherche médicale) dans le dernier numéro de la Revue française de sociologie. L’anorexie et la boulimie, heureusement, ne touchent qu’une toute petite partie de la population : pour l’étudier, les chercheurs s’appuient donc sur une enquête portant sur près de 40 000 jeunes.

Les hommes satisfaits d’eux-mêmes

D’abord quelques constats. Les jeunes hommes sont protégés, seuls quelques-uns – une poignée – déclarent des comportements anorexiques, les jeunes femmes sont trente fois plus nombreuses. C’est en partie parce que les jeunes hommes sont satisfaits de leur corpulence : en moyenne, leurs mensurations idéales correspondent aux mensurations qu’ils déclarent. Ce n’est pas du tout le cas des filles.

Les filles de cadres sont plus touchées que les filles d’ouvriers : les premières se fixent d’ailleurs les idéaux corporels les plus difficiles à atteindre. Enfin, si l’anorexie et la boulimie commencent à l’adolescence, c’est rarement avant l’âge de 15 ans, et bien après le début de la puberté.

Pour débrouiller le mystère, les sociologues font donc l’hypothèse que les caractéristiques (jeunes, femmes, de classes supérieures) doivent être réinsérées dans des rapports sociaux – de sexe, de classe et d’âge – dans lesquels le corps joue un rôle. Ces modes de relations régulières, ­entre individus différents et inégaux, sont alors étudiés.

Recherche de statut social à l’adolescence

Les rapports de sexe sont envisagés sous l’angle de la séduction, où la minceur féminine est valorisée, par les hommes et par les femmes. Il ne s’agit pas que de domination masculine et de normes imposées. La recherche de la minceur est partie prenante de celle du statut social à l’adolescence : « Dans cette période d’apprentissage où les individus ne peuvent pas tirer prestige de leur profession, les propriétés classantes sont l’apparence et les goûts culturels. » La minceur est ainsi inscrite dans des rapports de classes : dans nos sociétés d’abondance alimentaire, elle est associée aux classes ­supérieures et joue le rôle de critère de distinction entre femmes de milieux sociaux différents.

Et enfin il faut prendre en considération des rapports d’âge et de génération : les filles présentant une anorexie mentale ou une boulimie déclarent plus souvent des relations conflictuelles avec leur père et leur mère. (…)

 

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Santé publique et sécurité routière : Mélenchon le mieux noté par des experts

Santé publique et sécurité routière : Mélenchon le mieux noté par des experts

Jean-Luc Mélenchon a répondu positivement à toutes les propositions du questionnaire envoyé à sept candidats par des personnalités spécialisées de la société civile.

Les intentions de sept candidats à la présidentielle en matière de santé publique et de sécurité routière ont été passées au crible par des experts : Jean-Luc Mélenchon est le mieux noté, devant Benoît Hamon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron et François Fillon, selon des résultats publiés mardi.

20 questions pour tester les candidats. Sept personnalités avaient envoyé à tous les candidats une liste de 20 questions pour tester leur volonté d’agir contre des facteurs de risque évitables qui sont « à l’origine de 100.000 morts prématurées par an ».

Jean-Luc Mélenchon a décroché un 20/20 car il a répondu oui à l’ensemble des mesures préconisées par ces experts, y compris celles pouvant fâcher des électeurs. Benoît Hamon obtient un 15, Marine Le Pen 8, Emmanuel Macron 7 et François Fillon 2. Nathalie Arthaud a 13 et Jacques Cheminade 12. Les autres n’ont pas répondu. Nicolas Dupont-Aignan n’avait pas été contacté. Les réponses des candidats, les notes délivrées et les commentaires des experts sont accessibles en ligne.

Hausse du prix du tabac, taxe sur les produits trop sucrés… Sur la prévention, il a été demandé qui était prêt à augmenter fortement le prix du paquet de cigarettes, à favoriser l’activité physique dans la vie quotidienne par des financements et pour lutter contre l’obésité, à agir contre les aliments trop gras, trop sucrés, trop salés par l’intermédiaire d’une réglementation de la publicité et des taxes.

La lutte contre la promotion inappropriée des médicaments (avec interdiction des visiteurs médicaux et en faisant en sorte que la formation continue des médecins soit indépendante des laboratoires) ou l’augmentation du nombre de radars mobiles faisaient aussi partie des mesures proposées par les experts.

Mélenchon pour un paquet de cigarettes à 20 euros en 2022. Emmanuel Macron accepte d’augmenter le prix du paquet de cigarettes à 10 euros dès 2017, François Fillon refuse et Benoît Hamon propose d’augmenter les taxes de 10% par an sans répondre positivement. Aucun ne se déclare franchement pour un paquet à 20 euros à la fin de son quinquennat, sauf Jean-Luc Mélenchon.

Quant au remplacement de la mention « à consommer avec modération » par la quantité d’alcool pur en grammes et le nombre de calories dans chaque contenant, il est accepté par trois candidats (Hamon, Macron et Mélenchon), et considéré comme « à étudier » par François Fillon. Taxer les aliments proportionnellement notamment à leur teneur en gras, sucre et sel est accepté par Benoit Hamon et refusé par François Fillon, Marine Le Pen et Emmanuel Macron. (..)

 

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Santé : les non-dits de la campagne

Santé : les non-dits de la campagne

La santé s’est-elle vraiment invitée dans le débat présidentiel, comme l’affirment et s’en félicitent de nombreux acteurs du secteur ? Certes, la polémique autour des propositions de François Fillon, accusé pendant de longues semaines d’être le fossoyeur de la Sécu après avoir proposé une séparation entre la prise en charge du petit et du gros risque, a relancé la question du panier de soins et du rôle respectif des régimes obligatoires et des acteurs complémentaires, au premier rang desquels la Mutualité.

Les vraies questions sont-elles pour autant posées ? Cette polémique n’est-elle pas avant tout l’illustration de l’écart entre une protection sociale rêvée et une réalité que l’on préfère ignorer ?

Des écarts déjà actés

Bien sûr, la séparation petit risque/gros risque n’a aucun sens au-delà de la recherche d’économies de court terme. Bien sûr, cette séparation conduit à négliger la prévention.

Le taux de remboursement moyen est déjà de 90 % pour les soins lourds et de 50 % pour les soins courants

Pourtant, l’objectif d’équilibre des comptes s’est imposé et la tendance à la baisse du remboursement des soins courants a traversé les majorités politiques depuis de longues années, avec une ampleur et un rythme parfois différents, mais avec une grande constance et une conséquence que nul ne peut nier, un taux de remboursement moyen de 90 % pour les soins lourds et de 50 % pour les soins courants. N’est-ce pas déjà une séparation petit risque/gros risque… que chacun a accepté ?

Pourquoi cette évolution a-t-elle été possible ? Tout simplement parce que face à un débat limité aux équilibres financiers de court terme, chacun a intégré la nécessité de choix et que le simple bon sens conduit à privilégier la prise en charge des maladies graves au détriment des soins courants.

L’enjeu est aujourd’hui de permettre à chacun de bénéficier des progrès médicaux considérables qui ont marqué ces dernières décennies, d’avoir accès au bon professionnel, au bon traitement, au bon parcours de soins notamment pour éviter les retards de diagnostics synonymes de perte de chance pour les patients.

L’enjeu est d’adapter l’organisation de l’offre de soins et la protection sociale à une médecine efficace plutôt que d’entretenir la nostalgie de la Sécu de 1945

L’enjeu est d’adapter l’organisation de l’offre de soins et la protection sociale à une médecine efficace plutôt que d’entretenir la nostalgie de la Sécu de 1945… qui face à des possibilités thérapeutiques limitées devait se contenter de compenser tant bien que mal les conséquences de la maladie en versant des revenus de remplacement.

Trois sujets devraient être au centre de la campagne présidentielle, ils en sont étrangement absents : l’organisation des parcours de soins, le poids exorbitant de l’hôpital en France, et les nouveaux métiers à imaginer et à développer pour répondre aux enjeux de l’accompagnement au-delà des soins.

Organiser autant que financer

Il peut paraître paradoxal de reléguer les enjeux de financement au même niveau que l’organisation, voire derrière, mais aujourd’hui notre système souffre avant tout d’un manque d’efficience.

L’assurance maladie garde le monopole de la gestion du risque, même l’instauration des agences régionales de santé (ARS) n’a pas permis d’aller vers une réelle décentralisation de la gestion du risque, l’Assurance maladie ayant défendu son territoire avec un soin jaloux.

Pourtant la politique conventionnelle, qui incarne cette gestion du risque, a failli sur ses principaux objectifs.

Qui peut prétendre que la politique de rémunération des professionnels est une réussite alors que l’hétérogénéité demeure toujours aussi forte entre professions, à l’intérieur même des professions selon le secteur conventionnel et que les actes cliniques sont aujourd’hui encore sacrifiés au profit des actes techniques ?

Qui peut prétendre que l’installation des professionnels est un succès devant le développement des déserts médicaux ?

Qui peut prétendre que l’installation des professionnels est un succès devant le développement des déserts médicaux alors que les médecins sont encore aujourd’hui beaucoup plus nombreux qu’il y a quelques années… au moment où l’on parlait d’excédent d’offre ?

Qui peut prétendre que la lutte contre les « restes à charge » est une réussite alors que ceux-ci se multiplient sous l’effet de la déconnexion entre les bases de remboursement et les prix réellement pratiqués, les dépassements de tarifs représentant aujourd’hui environ 15 milliards d’euros au total ?

L’organisation des soins est trop complexe, trop dépendante de l’existant pour se satisfaire d’un modèle unique imposé par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) 1ou le ministère de la Santé. L’organisation doit être décidée au plus près du terrain pour articuler la médecine de ville, dont le pilotage incombe à l’Assurance maladie, et l’hôpital qui dépend des services ministériels.

Aujourd’hui, l’absence d’organisation est un facteur de perte de chance pour les patients. Les retards de diagnostic, notre incapacité à organiser les campagnes de dépistage auxquelles échappe une partie importante de la population, souvent la plus fragile, sont à l’origine d’une mortalité évitable.

L’amélioration de l’état de santé de la population passe moins par une évaluation de la qualité des actes individuels que par une amélioration des parcours, de la coordination entre professionnels. Ce n’est qu’ainsi que l’on pourra lutter contre la non-qualité. Tous les candidats déclarent vouloir la combattre, sans préciser comment.

Sortir des situations de rente et des corporatismes

Qu’il s’agisse d’améliorer la couverture vaccinale en la confiant en partie aux pharmaciens, de réduire les délais d’attente chez les ophtalmologues en développant les nouveaux métiers comme celui d’optométriste, d’inventer et de promouvoir de nouveaux métiers pour mieux répondre à des besoins liés au vieillissement, au développement des pathologies chroniques, toutes les initiatives se heurtent au conservatisme des syndicats professionnels et aux défenses corporatistes.

C’est ainsi que notre pays a toujours privilégié les spécialistes au détriment d’autres professions intermédiaires ou des généralistes, les médecins aux autres professions médicales, bref l’intervention la plus lourde au détriment de la mieux adaptée.

Les conséquences sont importantes : sous-utilisation des compétences, donc formations coûteuses mal utilisées, frustration des professionnels qui se sentent souvent déclassés, et prises en charge inadaptées, tout particulièrement pour les personnes âgées.

Il faut passer d’une organisation de l’offre à laquelle s’adaptait tant bien que mal le patient, à une organisation des professionnels autour de ce dernier

Le progrès médical et les formidables avancées techniques requièrent toujours plus de spécialisation mais à côté des actes techniques, le besoin de coordination, d’accompagnement est trop souvent oublié. Il nécessite bien sûr une autre organisation mais aussi et surtout de nouveaux métiers, une nouvelle répartition des tâches, une réelle coordination entre les professionnels.

Il faut passer d’une organisation de l’offre à laquelle s’adaptait tant bien que mal le patient, à une organisation des professionnels autour de ce dernier. C’est une remise en cause profonde du rôle des acteurs actuels, mais le malaise des professionnels de santé qui touche aujourd’hui toutes les professions témoigne de l’urgence d’avancer dans cette voie, non en imposant un modèle unique d’organisation et de répartition des compétences mais en faisant confiance aux acteurs pour expérimenter de nouveaux modes d’organisation et de coopérations professionnelles.

Redonner sa juste place à l’hôpital

L’hôpital occupe une place exorbitante dans l’offre de soins française, toutes les comparaisons internationales le confirment. Pour y remédier, la réponse a toujours été une contrainte budgétaire trop générale sans affichage suffisant de priorités qui se traduisent par l’affectation des moyens nécessaires à certains secteurs sinistrés… et la fermeture d’autres. La répartition quasi immuable des postes de professeurs des hôpitaux s’apparente plus au maintien de rentes qu’à une adaptation aux besoins et aux évolutions épidémiologiques ; elle entretient l’immobilisme…

La liberté d’installation demeure un tabou, du moins pour les candidats qui entretiennent un espoir raisonnable d’être élus

Mais aucun candidat n’ose prendre le risque d’aborder ce sujet. Pas plus d’ailleurs que l’organisation de la médecine de ville en amont et en aval de l’hôpital, sans laquelle toute tentative de réforme de l’hôpital est vaine. Est-il logique de préférer maintenir une structure hospitalière dans les zones dépourvues de médecins plutôt que de prendre les mesures nécessaires à leur installation ? La liberté d’installation demeure un tabou, du moins pour les candidats qui entretiennent un espoir raisonnable d’être élus. Alors qu’un rapport de 2004 du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM), voté y compris par les syndicats médicaux reconnaissait qu’en l’absence de succès des mesures incitatives, il faudrait la remettre en cause.

L’hôpital ne peut plus vivre en étant écartelé entre des soins de haute technicité et son rôle de filet de sécurité pour compenser les défauts d’organisation. (…)

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